Bordeaux Centre historique et Mériadeck

Bordeaux a connu un formidable plan de rénovation du Centre ville. Ce plan s’étend désormais au delà de l’hyper centre (plus ou moins la ceinture des Cours), vers les Boulevards.

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photos Laetitia Arès et Bordeaux aout 2015 003

Bref rappel historique.

La ville présente l’histoire de Bordeaux de manière détaillée sur son site, voici toutefois quelques éléments d’intérêt pour l’urbanisme actuel de la ville…

Commençons par un peu d’histoire, Burdigala du temps des romains était déjà une ville importante, puis successivement se sont superposées une ville médiévale dont le quartier Saint Michel et quelques portes restants sont les vestiges (Porte Cailhau et Grosse Cloche).

Avant cela, des vestiges gaulois ont été récemment découverts dans le sous sol de Mériadeck attestant d’une activité de tannerie et d’un peuplement plus important qu’estimé jusqu’alors.

Le port romain situé sur le site actuel de la basilique Saint Pierre était centré autour de la Devèze, une rivière qui servait de port (sous l’actuelle rue de la Devise), et la vile s’étendait plus ou moins entre la rue de la Porte Dijeaux, la rue Sainte Catherine étant un axe important également, jusqu’au secteur du Cours Victor Hugo.

De la ville romaine restent très peu de vestiges. Le plus célèbre et bien caché près de la rue Fondaudège étant le Palais Gallien, qui était un amphithéâtre romain hors de la ville et dont il ne reste plus qu’une porte et des pans de murs, le quartier environnant étant construit sur les vestiges de ce monument à partir du XVIIe siècle. En sous sol se trouvent probablement de nombreux trésors régulièrement mis à jour lors de chantiers en centre ville. Un autre monument célèbre disparu a inspiré l’architecture en colonnades du Grand Théâtre construit sur ses fondations: Les Pilliers de Tutelle, qui étaient un temple magnifique dont les ruines ont été démolies par Louis XIV malgré leur bonne état de conservation pour y édifier le château Trompeyte, situé sur l’actuelle place des Quinconces.

Par la suite, des fortifications médiévales dont subsistent quelques vestiges ceinturèrent la ville, 3 enceintes principales sont connues, après la période Romaine, la ville s’étendit vers le secteur Saint Michel et sa basilique dont la flèche de 110m domine le ciel  bordelais. La ville se développe aussi vers la Cathédrale Saint André de Pey Berland a été édifiée entre le XII et XIVe siècle, près d’une ancienne basilique. Des enceintes médiévales subsistent les portes Cailhau et la Grosse Cloche. Ces quartiers anciens, malgré quelques percées ultérieures (Cours Pasteur, Cours Alsace-Lorraine,…) et dégagements de places autour des églises surtout, gardent aujourd’hui leurs rues tortueuses et étroites.

Lors du siècle des lumières et de l’époque classique, notamment grâce au commerce florissant du port (et au commerce triangulaire), la ville s’enrichit et se développa considérablement, de nombreux faubourgs (Chartrons, Saint Seurin) furent rattachés à la ville, les anciens fossés (du Cours du Chapeau Rouge et Victor Hugo) comblés, le château Trompeyte rasé car bloquant l’accès nord de la ville.

L’aspect le plus célèbre de la ville demeure la façade des quais et le triangle d’or (secteur central du Bordeaux classique, centré sur le Grand Théâtre, les Allées de Tourny), construit sur les fondations du château Trompeyte lui-même situé sur le site d’un ancien temple Romain disparu, les Piliers de Tutelle… dont les colonnes et les statues sont inspirées des Piliers de Tutelle. Aujourd’hui, ce secteur aisé a de larges avenues assez rectilignes, des parcs.

Peu à peu la ville s’est développée vers la périphérie, au delà des Boulevards. Les quartiers nord et su avaient une vocation plutôt industrielle ainsi que les quais. la construction du pont de Pierre ouvert en 1822 et de la passerelle Eiffel en 1860 pour les trains ont commencé à développer la ville vers la rive droite (le quartier La Bastide de Cenon a été annexé en 1865).

Bordeaux a aussi connu une architecture Art Nouveau (Maison Cantonnale à la Bastide), puis Art Déco (Stade Chaban Delmas et quartier Lescure, Piscine Judaïque,…). Cependant les guerres mondiale ont porté un coup dur à son port. Les Bassins à flots inaugurés fin XIXe siècle ont été bloqués dans leur extension par la Base Sous marine Allemande construite à la fin de la guerre, de nombreux bateaux ont été coulés dans la Garonne et le port s’est déplacé vers Bassens, laissant les quais du XVIIIe à l’abandon derrière des grilles avant leur transformation eu Autoroute à une dizaine de voies… Il suffit de se promener aux abattoirs Quai de Paludate (destruction prévue dès 2012) pour se faire une idée de ce qu’ils étaient.

Bordeaux une particularité, elle a souvent eu des intendant puis des maires influents politiquement et bâtisseurs, Tourny, Jacques Chaban Delmas, Alain Juppé. De nombreux projets, sont restés à l’État d’utopie (avec regret pour certains qui étaient magnifiques et auraient réglé des problèmes complexes actuels comme le manque de franchissements de la Garonne…).

Notons que Jacques Chaban Delmas a été Maire pendant 50 ans, et il a transformé la ville, pour le meilleur comme le pire. Bordeaux a eu trois nouveaux ponts (Aquitaine en 1967 et Saint Jean en 1965, François Mitterrand en 1993), une rocade autoroutière, la préservation du centre historique notamment le lancement de la rénovation du quartier St Pierre. Mais ses grands travaux sont surtout: les quartiers récents du Grand Parc (années 1950) et de Mériadeck (1955 à 1985) représentent aussi une autre façon de voir l’urbanisme, par barres et grands ensemble (Grand Parc) et sur dalle (Mériadeck). En effet, le vieux quartier Mériadeck était le témoin d’un métissage culturel atypique, d’une forte solidarité entre les nouveaux arrivants (c’était le quartier des immigrés et des classes populaires). Il y avait la place du marché aux puces dont seule subsiste la fontaine (la place se situe plus ou moins sous le tunnel de la rue du Château d’Eau), et il fonctionnait comme un village. Le quartier était aussi connu pour ses bars et les prostituées…

Cet ancien quartier très typique était cependant délabré et insalubre (inondations fréquentes, pas d’assainissement ni d’électricité…) et il a entièrement été rasé dès 1955 pour donner place à un ensemble assez étrange et atypique… Certaines idées étaient bonnes: créer des accès plus directs vers le centre ville: Cours du Maréchal Juin, rue Georges Bonnac, un grand parc face aux jardins de la Mairie, un centre judiciaire ouvert vers la place Pey Berland. Mais le projet a connu de nombreuses difficultés, 5 plans guides différents sans réelle coordination. Certains accès ont été inachevés comme la rocade intérieur des Cours et la rue Bonnac (qui a 4 voies en centre ville et seulement 2 le long du cimetière de la Chartreuse…). Et surtout l’erreur majeure a été de couper totalement certains axes routiers pratiques, en particulier le Cours Anatole France et la rue Belleville, ceci afin d’effacer toute trace du passé et appliquer un plan orthogonal même si cela était absurde… Aujourd’hui il faut don contourner le quartier car il n’existe quasiment pas d’axe traversant continu en largeur. Du premier plan guide, subsiste l’immeuble HLM rue du Château d’Eau et la Caserne des pompiers Cours du Maréchal Juin, un plan de grandes barres qui ont ensuite été utilisées au Grand Parc. L’équilibre financier du projet étant complexe avec des logements, il s’est peu à peu réduit et tourné vers les commerces et les administrations, ce qui en fait un quartier vide la nuit. par la suite sur un plan Jean Royer et Jean Villerval, divers schémas ont abouti au plan actuel avec des immeubles en forme Croix. Bien que cela soit peu commode pour des bureaux, Chaban a refusé tout assouplissement. Le quartier est partiellement composé d’ilots de dalles (loin du projet de dalle globale initiale), reliées par des passerelles et au final il est peu commode d’y circuler en tant que piéton. Certains assouplissements ont permis une meilleure connexion du quartier au Cours du Maréchal Juin, notamment le jonction par des escaliers avec le niveau rue. Mais l’ancienne partie Rue Bonnac constitue une rupture brutale avec la ville ancienne. Début 2000 toutefois, des évolutions positives ont eu lieu: passage du tramway au coeur du quartier, de nouvelles administrations, meilleure jonction avec la place Gambetta et le Cours d’Albret via l’ilot Bonnac, d’une architecture mixte moderne/ancienne, aménagement des abords de la pénétrante (Cours du Maréchal Juin) pour combler le no man’s land d’alors, et de nombreux projets, pour connecter le jardin sur dalle à la ville ancienne. Notamment en supprimant le tunnel rue du Château d’eau.

Les traces de l’ancien quartier sont rares, hormis le secteur Saint Bruno et son église, il reste peu de vestiges. Le marché a de lui-même migré vers la place Saint Michel  mais plutôt que de raser tout le quartier si brutalement et de s’obstiner avec des principes urbains (Charte d’Athènes de Le Corbusier de 1932) alors qu’ils montraient leurs limites, une requalification lourde mais par étapes, pourquoi pas avec des immeubles modernes mais mieux connectés à la ville ancienne aurait été plus pertinente. Une autre conséquence est aujourd’hui la fébrilité des bordelais face à tout changement et projet architectural. Il y avait 15000 habitants et il en reste 1500 dans le quartier. Et l’image du quartier moderne qui vieillit mal persiste. L’un des enjeux majeurs de ce territoire central va être de le reconnecter à la ville (phase entamée avec succès par le tram A), et de redensifier l’offre de logements, mais cela a un coût élevé e fait déjà trembler les riverains, notamment avec certains erreurs récentes comme l’immeuble Bouygues qui a non seulement bloqué la possibilité d’élargir la rue du Château d’Eau (pour rétablir un accès traversant du quartier), mais n’a aucun lien architectural avec les autres immeubles et une façade rempart qui bloque la vue sur la Cathédrale…

Lors de la destruction du vieux quartier de Mériadeck, Chaban Delmas a heureusement préservé le centre ancien et lancé un programme de rénovation, après des années de bétonnage, voies rapides et des embouteillages monstres. Ironiquement lui qui avait supprimé le tramway dans les années 1950 (alors que toute l’agglomération était desservie), n’a pas sur imposer son métro dont le projet trop couteux a été avorté dans les années 1990. Par la suite Alain Juppé et Hugues Matin, ses successeurs, ont créé une charte d’aménagement urbain du centre ville et pris des risques. Le tramway est revenu dans le centre ville puis en périphérie. L’occasion a été saisie surtout, pour environ 2 milliards d’euros (d’après le magazine Capital de Août 2011), de rénover l’ensemble des espaces publics, dans un premier temps dans l’hyper centre et autour des axes de tramway, et désormais la rénovation redonne à nombre de parkings sauvages leur fonction de place d’origine (Places du Palais, Lafargue, de la Comédie, de la Bourse,…). Le plus gros succès de Alain Juppé a été la rénovation des quais en rive gauche, critiquée car en effet il n’y a plus d’activité portuaire et le secteur des hangars manque parfois de vie l’hiver ou le soir (d’où la bonne idée sur Buenos Aires à Puerto Madero de créer des logements dans un contexte similaire sur le toit d’anciens hangars industriels). Pour cela l’autoroute a été réduite à 2 voies par sens avec des contre allées, les façades nettoyées, un parc aménagé sur les berges de la Garonne, certains hangars rasés pour remettre en avant la façade historique du XVIe siècle.

Comme la place de la Bourse cependant, dont la façade XVIIIe siècle du Palais Gabriel cache des rues tortueuse et populaires héritées du moyen âge, il reste encore beaucoup de travail, notamment dans les arrières. Le secteur Saint Louis et Bacalan au Nord, Belcier, Saint Jean, Victoire au sud, ou encore Caudéran à l’ouest. Pour les deux premiers, ces anciens quartiers ouvriers et populaires sont assez délabrés, peu accessibles et manquent d’équipement comme d’espaces verts. Pour Caudéran, rattachée à Bordeaux dans les années 1960, le secteur est mal desservi (pas de ligne de tram), disparate et déconnecté du reste de la ville. Certains quartiers de Caudéran sont très beaux, constitués de belles demeures et de parcs, mais un grand travail serait à faire pour rééquilibrer la rénovation de la ville, notamment la voirie secondaire qui est dans un état déplorable.

Cependant, pour Belcier et Bacalan, la situation devrait s’améliorer sous peu car deux grands projets urbains majeurs les concernent. Tout d’abord les Bassins à Flots promis à la rénovation avec le PAE de Nicolas Michelin.

Certains arrières de quais commencent à être rénovés comme la rue du Faubourg des Arts aux Chartrons,espérons que le quartier Saint Louis aura un développement plus coordonné comme le secteur Sainte Croix/ Saint Michel qui fait tampon avec le quartier Euratlantique. Pour ce quartier justement pour lequel nous avons un article dédié, l’idée est de rénover les abords industriels délabrés et les friches ferroviaires autour de la Gare Saint Jean pour y préparer l’arrivée des TGV directs vers Paris (2017), puis Toulouse et l’Espagne  (2020). Pour la partie centre historique, la rénovation depuis 1995 a moins bien fonctionné ici. Les Cours de la Marne et Aristide Briand sont très délabrées, et les secteurs avoisinants peu confortables. Mais là encore, face au succès de la rénovation du centre historique qui s’étend vers le sud (Cours Victor Hugo),  le projet Re(Centres) va bénéficier du PNRQAD, un programme de l’État pour rénover les quartiers anciens dégradés. Bordeaux centre est constitué d’une succession de placettes de villages reliées par des rues (semi)piétonnes, souvent étroites liées à l’ancienne ville médiévale. La bonne idée de ce programme et d’Euratlantique est de continuer dans cette logique, y compris dans les grandes friches pour éviter une coupure avec la ville ancienne. Ce projet devrait se dérouler jusqu’en 2013 et créer 1000 logements.

Le centre a une variété d’époques architecturales importante sur un périmètre réduit qui lui a valu son inscription au patrimoine mondial UNESCO en 2007.

Le magazine Géo propose un diaporama Avant/Après qui donne une idée du chemin Parcouru.

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