Les Bassins à flots en pleine renaissance

Bonjour.

Nous suivons depuis plusieurs années le projet des Bassins à Flots, quartier portuaire qui a une histoire ancienne, pourtant il était resté à l’abandon depuis des décennies. Ce chantier majeur lancé au début des années 2000 (après l’échec du projet de Antoine Grumbach) et divers reports, notamment en raison d’un plan anti-inondations plus sévère, de la crise de économique de 2008 et des lois qui ont plombé le marché de l’immobilier ensuite, a mis du temps à démarrer. Mais depuis 5 ans, le projet a pris une tournure incroyablement rapide, et ce n’est pas terminé, comme le rendu des halles Biltoki ci-dessous le prouve face à la Cité du Vin.

Deux événements majeurs l’ont relancé et accéléré. Tout d’abord, la mise en service (là encore retardée par des recours abusifs) du pont Chaban Delmas en 2013 qui était l’aboutissement du projet de rénovation des quais rive gauche. Ce pont a transformé un cul-de-sac en quartier passant et du coup relancé son intérêt. En parallèle, son attractivité culturelle a été renforcée par l’installation de la Cité du Vin, ouverte en Juin 2016 (270 000 visiteurs en moins d’un an).

La Cité du vin précède de nouveaux équipements, comme le Musée de la Mer enfin en travaux, le cinéma UGC (qui espérons-le ne sera pas bloqué par des recours), ces projets s’accompagnent de la rénovation et de l’utilisation culturelle de la Base sous-Marine. Après une première phase de logements, qui pour certains s’avéraient décevants, mal réalisés et mal pensés, certaines inquiétudes commençaient à poindre. En effet, certains ilots sont d’immenses copropriétés complexes à gérer et à entretenir (risque du symptôme des Grands Ensembles), le design de certaines façades (clad) fait penser à des prisons, et les normes RT 2012 créent des logements hermétiques, du fait de mini-fenêtres. Or en été, ces immeubles pensés pour un climat nordique montrent leur absurdité, sans parler des vis-à-vis de la sur-densité

 

L’ilot Origin et Nativ qui était le pilote du projet offre quelques immeubles intéressants, mais là aussi, nous avons 2 barres enserrant un pseudo-jardin en serre, privatisé et vide, alors qu’ils auraient pu faire un parc ou une place ici. Il aurait aussi été intéressant de créer un passage au milieu de l’ilot vers la rue Achard et les quais qui pourraient devenir accessibles à très long terme.

Enfin, d’autres programmes, très prometteurs sur le papier (Nouvelle Rive Gauche et Côté Bassin par exemple), ont été massacrés par des sous-traitants incompétents et des finitions bâclées, espérons que les promoteurs y remédient. C’est déjà le cas en partie, mais l’image du quartier en a souffert, sans parler des aménagements tardifs des rues adjacentes qui ont nuit à leur image.

 

Mais heureusement au fil de l’avancement du programme, nous reprenons espoir, tout d’abord par la montée en gamme des derniers programmes (il est vrai mieux placés). Influence ou Urban Dock ou Panorama par exemple ont un design intéressant, des finitions soignées. Les couleurs dorées et claires (proches de la pierre de Bordeaux) les intègrent mieux dans le tissu urbain, malgré les formes angulaires des façades.

Ensuite la rue Lucien Faure elle-même a radicalement changée. Bordée de vieux hangars, de squats et de maisons en ruines, elle a été élargie avec un couloir de bus central (qui espérons-le recevra comme prévu le tram à long terme), des trottoirs et des pistes cyclables sont prévus, les arbres seront plantés en hiver 2017 à la fin des travaux des immeubles la bordant. Ci-dessous la rue en 201 puis à droite fin 2016, au même niveau.

Cette avenue aura une phase 2 de travaux jusqu’à la place de Latule, l’une des plus laides et des plus embouteillées de la ville qui sera refaite également. Le calendrier a été décalé, peut-être pour anticiper le tram radial évoqué à long terme dans le secteur? Toujours est-il que ce boulevard a le mérite d’avoir un alignement de façades harmonieux et coordonnée (une « skyline »). En effet, cela manquait cruellement dans les quartiers  récents (Ginko par exemple), alors que Bordeaux (y compris Mériadeck) doit en partie sa renommée à ces alignements de façades. Près du pont levant, la résidence Influence a même des piscines sur le toit des immeubles.

Autre point intéressant, le quartier qui était dense et peu animé a commencé à évoluer avec des hangars très réussis, sur la plaque portuaire, ce qui conditionnait la réussite du projet global, bien que le port de Bordeaux ait tardé, l’harmonisation des espaces publics et leur rénovation a enfin lieu en parallèle: rue Lucien Faure, Quai Hubert Prom, secteur de la Cité du Vin, placettes et voies annexes. Les sentes, passages entre les résidences (accessibles aux pompiers également) sont en cours de développement, les plantations adoucissent le rendu anguleux des façades et atténue la sensation de densité du quartier.

Le projet de ANMA (Nicolas Michelin) a commencé à intégrer des placettes arborées très réussies, tout en gardant les rails et une partie du patrimoine industriel. Déjà les premiers étudiants et restaurants occupent le hangar G3 (photo du bas), le G4 et le G5 sont en cours de finition. Ensuite l’hôtel Radisson Blu, initialement mené par le groupe hôtelier du Seekoo assez célèbre dans Bordeaux, les hangars G7 et G8 seront lancés sous peu. Le G2 étant l’ancien hangar rénové qui a donné le nom des autres ensuite.

Sur le terrain du H2 (ex-Comptoir Maritime sur la photo de gauche) démoli en 2016, le hangar G1 a été dévoilé récemment, très beau projet alliant supérette, parking, commerces et bureaux, il sera démarré dans l’année et conclura la liste des hangars des quais. Les matériaux nobles et la qualité des finitions montre un changement d’échelle des projets, l’immobilier ayant connu un boom depuis 3 ans surtout.

 

 

Près du pont Chaban Delmas, un ancien squat a été rénové en restaurant solidaire, en respectant un ilot de maisons bordelaises en pierre, tout en lui ajoutant une extension très contemporaine en bois en forme de bateau, qui n’est pas sans rappeler l’Arche de Noé: le Jardin Pêcheur va ouvrir très prochainement.

Derrière C-Discount qui a permis la rénovation du hangar Nautilus, l’ilot Lesieur en partie démoli, accueillera le siège social du Crédit Agricole et des logements très haut de gamme, le programme Emblem (dont la tour a été réduite suite aux levées de boucliers). Le siège du Crédit Agricole de Jean-Michel Wilmotte a habilement repris la façade des hangars modernes de C-Discount qui lui font face sur le rendu plus bas.

Face à la Cité du Vin, derrière les écluses (dans un triste état), un programme de halles commerciales mené par le groupe basque Biltoki est bien avancé. Accolé au parking de la Cité du Vin (qui par contre est un ratage total, massif et incompréhensible face à ce monument), un autre hôtel de luxe est prévu, mais il semble que le dessin de Ibos Vitart avec la piscine à débordement ait été revu à la baisse?

En continuant sur la plaque portuaire derrière les silos se trouve l’ilot Bouygues avec de belles façades côté bassins (rue de Gironde) mais une façade arrière rue des Étrangers trop haute, sans luminosité et surtout qui a complètement raté l’intégration du hangar emblématique du Garage Moderne, qui est en déclin depuis. Cet exemple montre des erreurs de conception des ilots pilotes, visiblement rectifiées dans la suite du projet.

Le reste du périmètre portuaire, rue de New York, rue Delbos et Cours Dupré Saint-Maur a une programmation plus basse, qui fait le lien habilement avec le quartier d’échoppes de Bacalan, le programme Appolonia notamment. Près des quais, la parcelle Fradin (photo de droite) qui abritera le Musée de la Mer démarre, et derrière elle un ilot d’immeubles assez originaux et denses, à voir sur le long terme, mais les finitions semblent plus appliquées.

Enfin près de la Base Sous-Marine les immeubles de l’agence Baggio et de Matéo Arquitectura ont une volumétrie qui rappelle les contours de la base elle-même. Le projet l’Intendant de Vinci en travaux suit aussi cette logique. Derrière la Base Sous-Marine, un projet original de distillerie de Whisky (Moon Harbour) va recycler un ancien bunker derrière la base tandis qu’un parc linéaire la longera et rejoindra les Boulevards.

Surtout sur la plaque portuaire, le projet Quai des Caps va embellir la façade portuaire du Bassin n°1 sur l’emprise du H27 par exemple nous aurons des cinémas (à droite), et plus loin des bureaux et des logements assez design. La transition vers la place de Latule, Ginko et les Boulevards sera à terme remaniée.

 

Le nombre de chantiers réalisés et en cours est immense, nous pouvons considérer que la mi-parcours a été atteinte, la moitié des habitants (environ 12000 attendus en 2030) attendus sont déjà sur place, reste désormais à terminer la partie publique et équipements du quartier (il manque notamment des écoles), les voiries et le port de plaisance et ses 300 anneaux qui redonneront un visage plus attrayant à ce quartier central et prometteur!

 

 

Ce contenu a été publié dans Bacalan Bordeaux Nord. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.